Le nouveau président de la République François Hollande a choisi lors de sa journée d’investiture de célébrer la recherche à travers un hommage à Marie Curie et la présence de nombreux prix Nobel. Il est évident que le dynamisme de notre économie passera par l’innovation. Il n’est pas crédible d’espérer que les Français plébisciteront demain le «Made in France» si les marques françaises ne sont pas capables d’innover encore plus et d’offrir des bénéfices supérieurs à leurs concurrents (avec un bon rapport qualité-innovation / prix).
Mais comment renforcer la créativité de nos marques et de nos entreprises ?
Cela passe évidemment par améliorer et libérer le potentiel de créativité de tous ceux qui les gèrent.
Quelles sont les pistes possibles ?
Adobe (éditeur de logiciels, dont Photoshop) vient justement de réaliser une étude dans différents pays — dont la France — afin d’analyser les attitudes des populations vis-à-vis de la créativité. Réalisée également en Allemagne, elle permet de comparer les attitudes entre nos deux pays et donne des pistes d’explication, au niveau des individus, du gap de performances entre les deux économies — en complément d’analyses plus macro (voir un exemple ici).
Quels sont les principaux constats de cette étude ?
- il semble que la créativité n’est pas assez valorisée culturellement en France :
• les Français sont moins conscients que les autres du rôle de la créativité dans l’économie : seuls 77% d’entre eux pensent qu’elle joue un rôle clé dans la croissance (83% en Allemagne)
• seuls 14% pensent que la créativité est «extrêmement» bénéfique pour la société (24% en Allemagne et 36% aux Etats-Unis)
• seuls 15% pensent qu’il est «extrêmement» important d’être créatif dans leur vie (21% en Allemagne et 32% aux Etats-Unis) - les Français se jugent eux-mêmes peu créatifs : seuls 36% pensent l’être (43% des Allemands, 52% des Américains) et seuls 16% pensent qu’ils développent réellement leur potentiel de créativité
- au début de la vie, l’école étouffe la créativité pour 62% des Français
- au travail, c’est la pression sur la productivité qui nuit à la créativité (85% d’approbation, plus haut score de tous les pays testés) et finalement être plus créatif au travail n’est demandé qu’à 51% des personnes interrogées (62% des Allemands)
- transversalement c’est le manque de temps (52%), d’argent (46%) et de confiance en soi (29% vs. 23% en Allemagne) qui brident le plus l’expression de leur créativité selon les Français.
Quelles sont alors selon moi les pistes — au delà des réflexions macro — pour améliorer cette situation et libérer l’énergie créative dans la société et dans les entreprises ?
Au niveau sociétal :
- irriguer encore plus la société en valorisant culturellement la créativité.
Valoriser évidemment les chercheurs, les créateurs et les entrepreneurs, mais montrer également que la créativité n’est pas réservée à une élite (développer et médiatiser des concours d’innovations par exemple et pas que le concours Lépine). Redonner confiance à chacun dans sa capacité à être créatif et lui donner la possibilité de s’exprimer. - renforcer la créativité dès l’école en demandant plus de créativité, d’imagination et d’intuition aux élèves, en leur apprenant plus à avoir une réflexion et une création personnelle et en les valorisant dès qu’ils s’en montrent capables (voir par exemple les réflexions qu’avait menées Sir Ken Robinson sur le sujet, ainsi que le livre «Petite poucette» de Michel Serres).
Au niveau des entreprises et des marques :
- productivité et créativité ne doivent pas s’exclure. La culture des entreprises, leur organisation, mais aussi les évaluations individuelles et les formations devraient laisser plus de place à cette dernière. Des plages de temps pour la créativité devraient être dégagées sans que cela passe comme parfois pour de la rêverie (pas besoin d’aller systématiquement jusqu’à une journée par semaine comme chez Google).
- la créativité et l’innovation ne doivent pas non plus se borner à la technologie. On peut également être créatif en terme d’organisation, de services, etc. Il y a du “hard” et du “soft” .
- des outils, des méthodes et des techniques (y compris apprendre à mieux utiliser les réseaux collaboratifs et les informations disponibles sur internet) existent pour libérer ce potentiel créatif, seul ou en groupe. Des consultants et des formateurs existent pour y travailler avec les équipes internes… j’ambitionne d’en être.
Comme tout problème complexe, renforcer l’innovation des marques françaises et de l’économie dans son ensemble passe par des solutions macro et micro où le politique, l’école et les entreprises ont chacun une partie des solutions.
Mais il ne suffit pas d’argent et d’investissements, le travail est aussi à faire au niveau culturel et au niveau de l’individu pour libérer l’énergie créative et innovante.
La France et les marques françaises y gagneront la poursuite de leur belle et longue histoire d’innovations et de créativité…