Le concours Lépine vient de fermer ses portes avec la Foire de Paris mais pas de panique : Carrefour et Intermarché viennent à la rescousse des innovateurs.
Les deux distributeurs mettent en effet chacun en place un concours destiné à soutenir l’innovation. Modalités, récompenses et débouchés diffèrent par contre assez largement, avec je trouve une prime pour Intermarché.
Côté Carrefour, c’est la première année du concours InnovezBuzzezGagnez (le site n’existe plus mais on peut encore trouver quelques détails ici) réalisé en partenariat avec l’agence Opaya.
Pour participer, il suffit de réaliser une vidéo de son produit (hors alimentaire), de la poster sur le site et ensuite d’utiliser les réseaux sociaux pour faire voter un maximum de français pour son idée.
Les idées qui remporteront le plus de votes bénéficieront d’un accompagnement de Carrefour pour le lancement du produit (conseil sur la protection de la propriété industrielle, conseil sur la commercialisation du produit, mise en relation avec des organismes professionnels – soit un service estimé par Carrefour à 10 000 euros). Si le produit est commercialisable, Carrefour est prêt à le mettre en vente dans 200 magasins et sur son site internet (mais sans engagement de volumes).
J’avoue que ce concours me laisse dubitatif à la fois dans sa réalisation et dans son intérêt pour Carrefour, au-delà d’une petite opération d’image.
Le concours ne privilégie ni l’entrepreneur individuel, ni la PME ce qui part d’une bonne intention mais, dans les faits, mieux vaut être une PME et avoir un produit déjà prêt au lancement :
- l’innovateur individuel doit maîtriser la réalisation d’une vidéo et les réseaux sociaux car le concours teste autant la capacité à buzzer que l’intérêt réel de l’idée. Inutile de dire qu’un grand nombre d’innovateurs seront laissés de côté.
- si votre idée gagne et si le produit n’existe pas encore, inutile d’espérer beaucoup de ce concours. Le support sera limité (des conseils) et la vente dans les magasins Carrefour restera longtemps virtuelle. La cession des droits d’utilisation de la vidéo risque même de se retourner contre l’inventeur en terme de protection (Carrefour précise d’ailleurs bien les risques dans le règlement). Si l’enseigne avait voulu aller jusqu’au bout, il fallait participer à la création de l’entreprise, y compris au capital par exemple. Mais c’est un autre métier.
- une PME dont le produit est proche de la commercialisation est mieux armée mais, dans ce cas, les engagements de Carrefour sont tout de même limités (vente sous réserve de la signature d’un contrat d’achat dont rien ne précise les conditions…). Par contre un bon point : à ce stade Carrefour ne demande pas une exclusivité temporaire du produit. Pas sûr par contre que les votes récoltés par les réseaux sociaux soient un vrai gage de succès du produit dans les rayons.
Au final, quel est alors l’intérêt pour Carrefour ?
Rebondir sur la tendance à la mode du crowdsourcing (voir la page 6 du dossier de présentation) ?
Oui, mais dans ce cas, pourquoi ne pas organiser un concours pour trouver des idées innovantes pour l’enseigne en elle-même (qui en aurait bien besoin) ?
Cela me paraîtrait plus en ligne avec la définition réelle du crowdsourcing et plus efficace.
Le concours Intermarché est quant à lui plus ciblé, plus simple et au final je pense beaucoup plus efficace.
Pour la deuxième année, l’enseigne organise avec la FEEF le Grand Prix des Innovations PME, ouvert aux PME familiales (produits alimentaires ou non). Un jury sélectionne les 20 meilleures innovations (qui ne doivent pas encore être sur le marché), qui bénéficieront chacune de quatre mois de référencement dans les 1700 magasins de l’enseigne à partir de janvier 2013 (dont deux mois en exclusivité chez Intermarché).
Ensuite les clients de l’enseigne voteront et le gagnant final aura à nouveau 4 mois de référencement national (mais à ce stade, le produit devrait de toute façon tourner suffisamment pour que le référencement ne fasse plus débat).
Pour la première édition, ce sont les chips Marine de Bret’s qui l’ont finalement emporté.
Pour Intermarché et les PME, les avantages sont nombreux :
- les PME bénéficient d’une entrée dans 1700 magasins (peut-être pas tous dans la cible du produit néanmoins), d’une certaine notoriété (le palmarès a par exemple été repris dans LSA l’an passé) et au final d’un test grandeur nature avant un lancement dans les autres enseignes,
- l’enseigne fait venir à elle des nouveaux produits, s’assure d’une exclusivité temporaire qui lui permet de tester les performances (les mauvaises langues diront que cela permet de préparer d’éventuelles déclinaisons en MDD) et se bâtit à peu de frais une image de soutien des PME et du “Made in France” , ce qui en cette période n’est pas négligeable.
À quand les réactions des autres enseignes ?